"En regard" histoires de femmes
Je ne peux faire abstraction de l’environnement culturel, social, moral, évènementiel qui m’entoure. En tant que femme et mère je porte en moi un héritage qui m’a été transmis par d’autres femmes. Ce patrimoine me convoque, me fait agir. En tant qu’artiste, il me donne la matière, le moteur.
A travers ces portraits de femmes je livre ma réflexion sur ce qui nous a été donné ainsi que ce que nous avons oublié ou mis de coté pour parer au quotidien qui se trompe d’urgence. C’est aussi pour faire résonance au débat sur la mixité et la parité toujours d’actualité. Cet « état des lieux » n’engage que moi, en revanche la lutte, la vie, l’action ou l’engagement de femmes sont entrés dans un patrimoine féminin collectif. La liberté dont nous jouissons en résulte. A nous, devenus « passeurs » à notre tour, de continuer d’assurer sa pérennisation. Une plus grande reconnaissance de la complémentarité de nos différences aboutirait, à n’en pas douter, à un monde plus fermement conscient de lui-même.
Prenant comme support l’histoire de femmes illustres ou inconnues, mon travail ne se situe pas dans un historique du féminisme. Il est autant de questionnements sur le fait de devoir revendiquer une place que sur la nature de cette place elle-même. Sur la toile, les mots, les silhouettes deviennent graphismes, gestes, couleurs traduisant une émotion : de paix, de sérénité, de révolte ou bien de colère.
En 1791, Olympe de Gouge rédige la déclaration des droits de la femme et de la citoyenne ce qui lui vaut d’être guillotinée en 1793. Cette même année, la constitution exclut les femmes des droits politiques. Elles devront attendre 1944 pour voter, 1970 pour que l’autorité paternelle soit remplacée par l’autorité parentale. Au XIXème siècle, George Sand revendique avec force le droit d’être soi-même en toute circonstance. Louise Michel défend l’accès à l’instruction pour tous, en professant : « ni dieu, ni maître en connaissance de cause ». Lou Andréas-Salomé donnera l’exemple d’une grande liberté de pensée. Germaine Tillion, femme déportée à Ravensbrück , a mis au service du devoir de mémoire, une volonté et un courage surhumain... Taslima Nasreen témoigne, au péril de sa vie pour le droit d’être femme et d’aimer. Mère Thérésa se met au service des plus démunis dans un total « don de soi ». L’engagement n’est pas exclu de la poésie comme nous le montre Sapphô (Vème siècle av.J.C.). Les fragments qui nous restent de ses vers ont traversé les siècles et continuent de faire écho en nous. Un événement peut transformer une vie, voire bouleverser tout un paysage social et politique : c’est l’exemple de Rosa Parks. On trouve aussi des femmes inconnues qui de part leur foi en la vie nous laissent des traces indélébiles pour le reste de la notre.
Les couches de peinture que je superpose sur la toile suggèrent les strates de la vie. Les transparences révèlent les mémoires. Les lignes verticales symbolisent le lien continu entre nos origines et notre pensée. Les mots sont là, présents, en attente d’expiration : des mots pour dire, des mots pour transmettre… des mots en devenir.
album photo "Histoires de femmes"