Installation au Musée de Tessé
MOT A MOT
installation au musée de Tessé, le Mans
"J'ai mes amulettes: les mots"
Henri Bosco cité par Gaston Bachelard dans "la poétique de la rêverie"
prenez le temps de voir tous les chacuns de soi qui forment une spirale…
un+un+un+un+un+...ça fait tout.
toute une humanité qui court.
qui court après quoi ?
qui risque de passer de l’autre côté du miroir sans avoir eu le temps de voir l’autre.
revenez du bon côté
regardez ça dans tous les sens
regardez ça par tous les sens
ne touchez à rien
soyez touché.
on lui a fait don de bouts de soi qu’elle a tissé, qu’elle a tressé comme les vies se tissent,
les respirations se mêlent.
à chaque regard,
un bout de voix…
entre ses doigts,
le rabot du menuisier devient harpe de mémoire
les crayons mal fagotés de l’écolier donneraient presque envie de pleurer.
que de valises ouvertes,
de cœurs égratignés
qui au fond du miroir
s’envolent plus légers.
elle, elle est des deux côtés,
petite main tendue,
à travers le miroir.
sabine rosnay d’après l’œuvre et les mots d’agnès rainjonneau
photo Dominique Poussin photo Arnaud Coutancier
La genèse:
MOT à MOT est une installation faite d'objets et de mots.
Ce travail a débuté en allant à la rencontre des habitants du quartier de Perseigne à Alençon. Je commençais par une marche à pieds à travers les barres d'immeuble occupant une grande partie de ce quartier. A première vue tous ces blocs semblaient identiques. Mais plus j'avançais, plus les fenêtres me happaient. Les rideaux, me racontaient l'Homme derrière la fenêtre.
«Derrière ta fenêtre, tu me parles et pourtant je ne te vois pas!»
Je réalisais que l'objet pouvait se charger d'une histoire individuelle. Par exemple, un objet oublié dans la rue, tombé, portait en lui la mémoire d'un autre jour, d'un autre lieu. Il pouvait être aussi un support à l'échange. Il est plus facile de parler de soi à travers un objet, alors j'ai demandé aux gens que je rencontrais de m'apporter un petit objet personnel et de me raconter la tranche de vie qui s'y rattachait. Grâce à cet échange, l'objet (chargé de cette histoire) est devenu un « grigri ». Gardant tout son mystère, je l'ai habillé, orné, transformé pour le restituer aux yeux du spectateur.
Ces objets, accumulés au centre de la chapelle, tout comme ces parties de corps sur les dessins suspendus aux murs sont des maillons de la chaîne de l'humanité. Derrière chacun d'eux, il y a une histoire, un Homme.
Tous les sens sont en éveil. Contre les murs, en suspens, des bouches, des yeux, des mains nous parlent. De l'objet, je suis passée tout naturellement aux mots.
Si tu étais un objet,une couleur, un mot, lesquels serais-tu?
J'ai posé cette question à quatre-vingt personnes. Je demandais à chacun de se raconter, de se présenter avec trois mots. Puis ils devaient les écrire sur une feuille imprimée d'une poésie de Saïd Mohamed. Chacun pouvait entourer, hachurer, supprimer des mots ou des phrases du poème. J'ai choisi cet auteur, car dans son œuvre poétique et dans ces romans, il se nourrit de l'instant. Chaque émerveillement, chacune de ses colères prennent leur épaisseur dans la fragilité de l'autobiographie. Ces multitudes d'instants construisent sa vie comme un immense puzzle sans que demain il sache quelle pièce il viendra rajouter.
Les poèmes sont extraits du recueil « Souffles » Ed. Les Carnets du Dessert de Lune. Vous pouvez vous procurer ce recueil par le lien suivant http://rezolibre.com/detail.php?article=507
Le travail sonore d'Arnaud Coutancier qui accompagne l'installation, tisse, met en lien toutes ses rencontres. Arnaud les a toutes suivies. Il a capturé sur le vif nos échanges puis en a sorti quatre montages.